Histoire vraie des faux jumeaux de Lagarde

La généalogie nous réserve bien des surprises.

 

 En cherchant à réaliser l’arbre généalogique de tout le village de Lagarde, il m’arrive parfois, de trouver de curieuses histoires.

Celle arrivée à Paule Bélinguier et Guilhaume Capelle en est une.

 

Paule est la fille de Pierre Bélinguier et de Françoise Amiel. Deux très grandes et anciennes familles de Lagarde.

 

Paule se marie avec Guilhaume Capelle à l’âge de 21 ans, lui a environ 25 ans. Le mariage est réalisé à l’église de Lagarde le 13 octobre 1789 par le curé, Jean Baptiste Fauré. Guilhaume est issu d’une famille de travailleurs meuniers de Caignac.

 

Le couple aura 12 enfants, dont le premier Marie naît le 28 mai 1792 à Lagarde.

 

Le 23 mai 1795 naîtront des faux jumeaux, Guilhaume et Catherine.

 

Le couple travaille alors au moulin du village, celui qui est visible en ruines en contrebas du bourg. Ce moulin appartenait au maire du village, Monsieur Martin Saubat.

 

Les naissances suivantes alternent entre les moulins d’En Jacquou et celui du village.

 

Le 20 avril 1798 Paule naît au moulin d’En Jacquou qui appartenait à Monsieur Cantalauze. A cette date il est séquestré par le Comité révolutionnaire de Villefranche.

 

Ensuite la famille s’agrandie ; le 11 mars 1799 naît Jean et le 14 avril 1801 c’est Marie qui voit le jour au moulin du village. Anne naîtra le 3 octobre 1802 au moulin d’En Jacquou, toujours sous séquestre.

 

Raymonde naît le 8 mars 1804 et sa sœur, Germaine, naîtra le 23 octobre 1804.

 

C’est après que le couple va faire parler de lui. Il n’y a pas de témoignages mais je suis sûre que dans tous les « cantous » au coin du feu, les lagardais n’ont jamais cru à cette histoire : Des jumelles à soixante sept jours d’intervalle, c’est du jamais vu à Lagarde et ailleurs.

 

Moi non plus, je n’ai pas cru les enregistrements de la Mairie. Paule née le 16 mars 1807 et Marie le 22 mai, il devait y avoir une erreur quelque part.

 

Je me disais que, le secrétaire de mairie et Monsieur le Maire, Jean Georges Reynis, forgeron de son état, avaient trop fait la fête.

 

Mais non ! Après des recherches sur Internet, j’ai trouvé que ce phénomène arrive rarement, mais il arrive. Le CHU de Rouen l’appelle « Superfétation » et le décrit comme : « Fertilisation d'un ovule qui survient quand un fœtus est déjà présent dans l'utérus; la superfétation entraine une grossesse inhabituelle avec des fœtus d'âges et de grandeurs différents qui se développent simultanément in utéro. »

 

D’autres naissances de ce genre sont visibles sur Internet.

 

J’ai donc gardé ces deux naissances dans l’arbre généalogique de Lagarde.

 

 

 

Pour l’histoire, Marie est décédée le 14 janvier 1811 à 3 ans et demi. Guilhaume, le père décède le 10 juin 1829 au moulin d’En Jacquou à 65 ans. Sur l’acte de décès il est noté comme « Garçon meunier ». C’est son patron, Jean Decamps, qui vient déclarer le décès. Decamps avait acheté le moulin d’En Jacquou en 1813 à la famille Cantalauze, qui avait récupéré ses biens après la révolution. Paule se reposera éternellement, beaucoup plus tard.

 



1652 - Un coup de feu mortel à Lagarde

 

 

Essai de transcription

 

Le 11 aoust 1652 environ les neuf heures

 

du soir Germa Taurines, aagé de vingt et trois

 

ans a esté tué d'un coup de pistolet près

 

le jardin du recteur de ce lieu de Lagarde

 

et cest traîne jusqu'au devant le moulin

 

pastelier de monsieur Roqua vieux et a est[é]

 

ensevely le 12 du susdit mois ---- – avoir

 

este visité par René Gaubert auparavant

 

Monsieur le curé de Lagarde nous révèle un crime encore non élucidé.

 

 

 

C’est arrivé le 11 août, nous dit Monsieur le curé de Lagarde, aux environs de neuf heures du soir. Germa Taurines âgé de vingt-trois ans a été tué d’un coup de pistolet tiré près du jardin du Recteur du lieu de Lagarde. Ensuite, il s'est traîne jusqu’au moulin pastelier de Monsieur Rocqua le vieux.

 

Le corps a été identifié par René Gaubert et enseveli le 12 août 1652.

 

Nous ne connaissons pas la filiation de Germa Taurines car les registres paroissiaux de l’année de sa naissance, probablement 1629, n’ont pas été conservés.

 

 

 

Qui a tué Germa Taurines et pourquoi ?

 

Ces questions sont actuellement sans réponse.

 

Le 12 août 1652 la France et le Languedoc sont dans le plus grande désordre. L’État est très affaibli par les Frondes des nobles et des parlementaires contre Mazarin et la régente Anne d’Autriche. Le roi Louis XIV a été officiellement reconnu majeur le 7 septembre 1651, mais n’a pas encore mis de l’ordre dans les provinces de France.

 

D’anciens soldats en bandes parcourent les provinces, pillent les populations, tuent les paysans, violent les femmes en toute impunité. Les troupes elles-mêmes commettent des désordres similaires dans les villes où la population est obligée de les loger.

 

 

L’enquête continue, mais les documents de l’époque se font rares. Les registres des délibérations des consuls de Lagarde se terminent au mois d’avril de 1652 (cote AD31 ; 2E10282).

 

Germa Taurines n’est pas mentionné dans la liste de « la plus grande et saine partie des habitants du dit lieu de Lagarde ». Autrement dit, s’il habitait Lagarde, il ne possédait rien et donc n’avait pas voix au chapitre lors des réunions des consuls.

 

Le lieu du crime, près du jardin du Recteur, est probablement celui appelé en 1791 dans la matrice « Jardin Communal » parcelle 75 sur le plan cadastral de 1768 (1G2 cote AD31 ; 2E11476) attenante à « l'ancienne maison curiale ».

 

 

 

Que faisait Taurines à 21 heures dans ce jardin ?

 

 

Il s'est traîné jusque devant le moulin de Monsieur Rocqua.

 

Monsieur Rocqua est cité à plusieurs reprises dans les délibérations des consuls de Lagarde, (cote AD31 ; 2E10282). Il prend partie aux réunions en tant que possédant.

 

Taurines travaillait-il au moulin et se serait traîné blessé jusque là ?

 

Le moulin pastelier était situé en haut du chemin reliant Lagarde à Mazères sur ce que s'appelait la plaine de Balanquier (Jehan de Balanguier co-seigneur de Lagarde et capitoul de Toulouse 1588-1589). Soit aux environs de l’actuel bassin d’orage du lotissement des Hauts de Rocqua. Ce moulin est sur la carte de Cassini de 1761. En 1791 il appartenait à Messire Michel de Cantalause, il a été un temps séquestré pendant la période révolutionnaire et vendu en 1823 par Madame de Cantalause à Louis Décamps qui le déclare démoli au cadastre en 1869.

 

 

Nous poursuivons l’enquête et faisons un appel à témoins.

 

Toute personne, ayant des éléments permettant d’élucider ce crime, est priée de contacter l’auteur.

 

Carlos Estevao.

 

 

 

 

 

Le bourg de Lagarde et ses habitants en 1791

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Le Bourg du village de Lagarde avec ses habitants en 1791
Plan réalisé avec le plan cadastral de 1786 et les matrices de 1791.
Le village de Lagarde en 1791 v01.jpg
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Lagarde à travers les temps